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Moisson à la ferme des prés |
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La moisson: le moment le plus attendu de l'année, était l'aboutissement du travail avec la récompense: la recette d'une année de labeur. Je rentrais du lycée le treize juillet et l'après-midi, avec mon père, nous nous occupions des moissonneuses-lieuses, c'est-à-dire les machines qui couperaient les céréales, près du sol et qui rejetteraient liées en bottes, prêtes à être mises en tas. . |
Vareilles: scène de moisson |
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scène de moisson |
C'était un mois de travail intensif, mais toujours exécuté
joyeusement, en plein air, au grand soleil, avec des journées qui
n'en finissaient pas. Il fallait sortir d'une petite remise les moissonneuses, les graisser, les huiler et installer les toiles qui permettaient au blé coupé de passer du tablier horizontal vers le lieur qui liait les bottes avec uns ficelle en sisal ( en papier, pendant la guerre ). C'était un machinisme très délicat à régler qui ficelait une botte toutes les trente secondes. Quand tout était bien en place, le matin du quatorze juillet, nous faisions trois ou quatre tours de champs avec chaque machine afin que tout soit prêt à fonctionner à plein le quinze juillet. |
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Pour
chaque pièce de terre, il fallait faire une place pour le passage
des chevaux: c'était la dérivation ou le déroutage, qui se faisait à
la main, avec une faux. Cette dernière était spéciale, avec un
«harnais» en bois et des petites tiges de fer qui pouvaient régler
l'ouverture du harnais. Le faucheur: Lucien était un spécialiste qui entrait carrément dans le champ en coupant le blé pour le mettre en «andins», ou mieux en «javelles», c'est-à-dire que le blé coupé était en deux ou trois coups de faux rassemblé et laissé à terre en un tas de la grosseur d'une gerbe. |
scène de moisson |
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Vareilles: scène de moisson |
Derrière le faucheur,
un ouvrier faisait un lien avec ce même blé et bottelait le tout II
fallait naturellement dériver tous les champs de blé, d'avoine,
d'orge ou de seigle et comme c'était le périmètre du champ, c'était
naturellement le chemin le plus long à faire. Dès qu'un passage était ainsi fait, la moissonneuse, avec ses trois chevaux, commençait le travail. Deux personnes, et j'étais toujours du nombre, ramassaient les gerbes ainsi confectionnées pour les mettre en tas afin de finir de les sécher, au soleil: tas de neuf, debout, l'épi en l'air ou bien en croix, couchées sur le sol, trois l'une au-dessus de l'autre, la dixième cul en l'air afin de protéger les autres en cas de pluie. |
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Et ça, c'était le pépin, la
hantise au moment de la moisson : les gerbes devaient être
rentrées très sèches. En cas de pluie, dès celle-ci arrêtée, il
fallait ouvrir, défaire les tas, les laisser sécher deux ou trois
jours, et remettre en tas. Vous imaginez le travail, la perte de
temps et en fin de compte, la perte de grains. A force d'être remués, les épis finissaient par s'égrener. Quand la pluie persistait, en 1933 par exemple, les grains finissaient par germer: le sommet des tas verdissait et les grains étaient définitivement perdus. |
Vareilles: les premiers tracteurs |
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Vareilles: instruments agricoles (exposition de 1993) |
C'est ainsi que, pendant l'Occupation, je faisais équipe avec un Parisien réfractaire au S.T.O. et qu'un après-midi, nous causions avec deux frères natifs du pays, mais illettrés. Dans la conversation, l'un dit : «Je connais l'école où était André (le collège de Joigny), j'y suis allé». Le Parisien répliqua : «Je me demande bien pourquoi faire puisque tu ne sais pas lire» et l'autre de répliquer: «J'allais chercher des croûtes de pain!» Ce n'était pas particulièrement drôle mais nous avons bien ri. |
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Lorsque
les
blés étaient coupés et rentrés à la ferme, les habitants pouvaient
venir glaner, c'est-à-dire ramasser les épis tombés sur le sol, et
cela un par un. C'était très long et destiné à la nourriture des
volailles. Il faut signaler que certaines personnes partaient
toujours glaner à l'heure du déjeuner et pouvaient ainsi glaner
«plus rapidement», en rapportant une gerbe prise sur un tas. Lorsque tous les champs étaient moissonnés, nous devions rentrer tout cela à l'abri. Une personne restait au champ, «le tandem», qui tendait les gerbes, les unes après les autres au charretier grimpé dans sa voiture, une gerbière, et qui empilait les gerbes d'une certaine manière, le tout sans en perdre car avec les chemins cahoteux, ce n'était pas gagné d'avance! |
Vareilles photo d'époque |
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Vareilles:
la
moisson la dernière charette ornée de la couronne de moisson |
Pendant que l'on
chargeait, un autre revenait à la ferme, sa voiture chargée et un
troisième repartait à vide dans les champs. La quatrième voiture
restait sous le hangar pour le blé, dans la grange, pour l'avoine
pour que l'on puisse la décharger. Ainsi, s'établissait un roulement
et le travail était continu. Sous le hangar extérieur à la ferme, nous y mettions le blé, entassé travée par travée. A une certaine hauteur, hauteur limite pour que la personne déchargeant la voiture puisse donner sa gerbe, nous installions la chaise. C'était un plateau fait de planches et suspendu dans le vide par deux tiges métalliques d'un côté et retenu par deux chaînes, le tout pas très stable mais permettant d'empiler les gerbes jusqu'au sommet du hangar. |
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Dans la grange, le passage des voitures était au centre avec deux travées de chaque côté. Il fallait donc envoyer les gerbes d'avoine, heureusement pas lourdes, jusqu'à la deuxième travée et cela demandait un ouvrier sur la voiture, deux sur le tas, toujours avec des fourches et un quatrième, le tasseur, qui plaçait les gerbes afin qu'il soit facile de les reprendre après et aussi afin que le tas ne «vêle» pas, c'est-à-dire ne s'effondre pas et cela a été rapidement mon travail de vacances. | Vareilles: instruments agricoles (exposition de 1993) |
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Vareilles: après la confection des meules de paille |
Quand la récolte était bonne, il
fallait confectionner des meules rondes, évasées du pied jusqu'à
une certaine hauteur puis se rétrécissant rapidement pour former
un toit et ça, c'était plus difficile, car, en tassant, la meule
avait vite fait de pencher et même de s'écrouler et, à ce moment,
les quolibets ne manquaient pas. Enfin, lorsque la dernière
voiture devait rentrer, il y avait toujours un ouvrier pour
confectionner la couronne de moisson, tressée à l'aide de blé,
d'avoine avec un bouquet de fleurs chapardées au jardin de la
patronne. On s'arrangeait toujours pour passer, avec cette
couronne au-dessus de la voiture tout le village pour que l'on
sache que, chez nous, la moisson était terminée et, c'était à qui,
dans le village et les environs le ferait le premier.
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Dès la moisson terminée, venait la fenaison des regains (deuxième
coupe de foin après la première qui avait lieu avant les moissons).
Comme d'habitude, après le passage des faucheurs et après quelques
jours de séchage, c'était la faneuse puis le râteau pour rassembler
le foin en "andins" et aussitôt de nouvelles équipes venaient aider
à mettre le foin en tas, pour que celui-ci finisse de sécher. Ensuite, nous rentrions tout cela dans les greniers: au-dessus de la vacherie et de la bergerie. Là, dans des greniers bien aérés, le tout séchait et se conservait jusqu'à la récolte suivante. Il était facile, chaque jour, de monter au grenier «descendre» le foin nécessaire à l'alimentation des différents animaux. Celui-ci tombait directement devant chaque porte d'étable. |
Scène de moisson |
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Les labours |
Ensuite, pendant que
les charretiers labouraient pour les futures semailles, les autres
s'occupaient à arracher et lier en poignées les haricots qui étaient
rentrés par deux ou trois voitures et suspendus sur des fils afin de
sécher, de se conserver et d'attendre les besoins au jour le jour:
deux à trois cents kilos l'année. De même pour les pommes de terre, tout le monde s'y mettait et pour les ramasser dans les champs, chacun à son rang, avec ma mère, toujours en tête pour les trier: les plus petite pour la nourriture des cochons, les moyennes pour la vente et les grosses pour la consommation familiale. Il en fallait des tonnes pour une moyenne de quinze personnes à nourrir. |
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Ensuite, déjà la période était arrivée pour l'arrachage des
betteraves, à la main, l'une après l'autre: pas de machine comme
maintenant où tout est fait mécaniquement Quand une betterave d'un
mètre de long était arrachée, cela méritait un verre d'alcool en
récompense ; c'était la coutume! Quand je dis un mètre de long, cela
signifie qu'une betterave de belle taille pouvait avoir une fine
racine d'un mètre de long. Mais, c'était rare d'avoir celle-ci
entière. Les betteraves à sucre étaient arrachées à l'aide d'une petite fourche à main. Puis il fallait charger les tombereaux, avec le mauvais temps qui arrivait: pluie et boue partout! Il fallait livrer le tout à la gare de Theil, quatre kilomètres aller et quatre retour et charger à la fourche les wagons de vingt ou trente tonnes. Il faut l'avoir fait pour savoir combien ce travail est fatigant et difficile, par tous les temps. J'en parle en connaissance de cause puisqu'en 1939, mon papa et les ouvriers étaient mobilisés et la rentrée scolaire retardée, j'ai dû aider à la récolte des betteraves. |
Vareilles: la récolte des betteraves |
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Vareilles: instruments agricoles (exposition de 1993) |
Les semailles venaient avec les jours qui raccourcissaient et nous menaient vers l'hiver où les journées très courtes et le travail terminé aux champs permettaient à tout le monde de souffler un peu et de prendre un temps de repos bien mérité. |